REFLEXION BUJINKAN

Les réflexions d'un Shidoshi

L’honneur des samouraïs (le bushido)

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Le bushido a influencé la culture japonaise. Il est un rappel que la force et le courage ne sont pas les seules qualités importantes dans la vie. La loyauté, la compassion et l’honneur sont tout aussi importants.

Mais comment ? quand est né le bushido ? Le code du bushido a-t-il réellement était suivi par les samouraïs ?

samourais de l'ère Edo
Des samouraïs de la fin de l’ére Edo

Le bushido : un code d’honneur

Le bushido, d’après la légende, est un code d’honneur qui a été développé par les samouraïs, pendant la période du Japon féodal, au 12ème siècle plus précisément.

Il est basé sur les principes de la loyauté, du courage, de discipline, d’honneur, de compassion et a été influencé par le bouddhisme zen, le confucianisme et le shintoïsme.

On ne peux pas nier que le bushido a joué un rôle important, voir déterminant, dans la culture et la formation de l’identité japonaise du 20ème siècle.

Toutefois, le bushido a été écrit par Inazo NITOBE (1862-1933) seulement au tout début du 20ème siècle (vers 1900) et a été publié pour la première fois en 1906 sous le nom de « Bushido, l’âme du Japon ».

Inazo NITOBE était issu d’une ancienne famille de samouraïs et était un diplomate, ayant vécu aux Etats-Unis, en Allemagne et en Suisse. Il était convertit au Christianisme.

Il est avéré que ce livre a servit par la suite pour la propagande nationaliste japonaise lors du 20ème siècle, afin de promouvoir un prétendu « esprit samouraï » qui sera repris par les militaristes lors des guerres expansionniste japonaise (Corée en 1910, Mandchourie en 1931, Chine en 1937) et la seconde guerre mondiale (endoctrinement des kamikazes et de la population).

L’esprit du bushido sera également inclus dans les arts martiaux japonais moderne (Judo, Karaté, Aïkido,…) au début du 20ème siècle.

Le Hagakure : l’origine du bushido

Il semble que le bushido tire sont origine en partie de contes et légendes sur le destins extraordinaires de certains samouraïs racontés à Inazo NOTIBE lorsqu’il était enfant et l’autre partie des pensées et des enseignements du « Hagakure », qui est un livre écrit entre les années 1710 et 1717 par un samouraï dénommé Jocho YAMAMOTO (1659-1719).

Selon la légende, il est dit que le manuscrit a été préservé et gardé secret pendant plus de 150 ans par le clan NABESHIMA. Ce qui veux dire que le manuscrit aurait été rendu public qu’à partir de 1860 au minimum. Il est aujourd’hui avéré, que le grand public japonnais n’a eu accès à celui-ci qu’à partir du tout début du 20ème siècle et que le livre « Bushidō, l’âme du Japon » a été écrit dans la foulée.

Il faut avoir en tête que le Hagakure a été écrit en plein milieu de la période Edo (1603-1867), qui est une longue période de paix et que les divers conflits (et donc les combats) étaient terminés depuis plus d’un siècle.

Il s’agissait d’une période où un grand nombre de samouraïs, à défaut de pouvoir combattre, écrivirent des récits et des autobiographies sur les samouraïs des ères précédentes, le plus souvent représentant des faits au combat imaginaires ou très enjolivés dans les détails, car nostalgiques d’un temps passé. On peux considérer beaucoup de ces écrits comme l’équivalent de nos romans historiques d’aujourd’hui (qui ne sont que des œuvres de fiction prenant en toile de fonds un épisode de l’Histoire).

Les samouraïs étaient nostalgiques car, dans le temps passé, lorsqu’ils étaient vainqueurs lors des combats, ils pouvaient accéder à une renommée, à certains privilèges et, même contrairement aux idées reçus, à une richesse qui leurs restaient désormais inaccessibles ou difficile à atteindre.

Il faut savoir, que la caste des samouraïs a été abolie (et n’existe donc plus) dès les premières années de l’ère Meiji (1867-1912) par décision de l’empereur, suite à la défaite du Shogun (et de ses samouraïs) contre l’armée impériale lors de la guerre de Boshin.

L’honneur des samouraïs est-il un mythe ?

L’honneur des samouraïs est associé au mythe même du bushido. Ils sont souvent dépeints comme des guerriers courageux et honorables qui étaient prêts à mourir pour leur seigneur et pour lesquels le code d’honneur du bushido était au-dessus de tout.

Le livre « Bushido, l’âme du Japon » n’ayant pas existait en tant que tel avant le début du 20ème siècle, ce dernier n’a pas pu être suivi au niveau de ses enseignements par les samouraïs.

Est-ce que les enseignements du Hagakure ont été respecter avant l’ère Edo (1603-1867) ?

Comme nous l’avons vu précédemment, les écrits du « Hagakure » ont été produits au milieu d’une longue période de paix au 18ème siècle et où les récits des samouraïs étaient le plus souvent exagérés. De plus, le manuscrit du Hagakure a été gardé par un seul et unique clan pendant plus de 150 ans et sa diffusion grand public n’a eu lieu qu’au début du 20ème siècle également.

D’ailleurs concernant l’application du principe de loyauté prescrit par le bushido, l’historien Pierre-François SOUYRI, explique notamment dans sont livre « Histoire du Japon médiéval » :
« Pour peu que la situation devienne difficile sur le plan militaire, le samouraï est prêt à trahir ou à déserter. C’est la victoire qui l’attire et la perspective de récompenses. Il est avant tout opportuniste ».

Il ne faut pas oublié, que dans les faits historiques, lors de la bataille de Sekigahara, qui a eu lieu le 21 octobre 1600, c’est grâce à la trahison de plusieurs samouraïs qui étaient auparavant fidèles au clan TOYOTOMI et qui ont changés de camp au milieu de la bataille, que le clan TOKUGAWA à remporter la victoire.

On sait également que les samouraïs de l’époque féodale étaient plutôt rustres et faisaient parfois régner la terreur parmi la population (tout comme nos chevaliers occidentaux et avec les mêmes travers). Ils étaient loin de l’image idéalisé que l’on en a aujourd’hui, qui correspond plutôt aux samouraïs de l’époque Edo (1603-1867).

Mais est-ce-que les enseignements de ce que l’on appelle aujourd’hui le « bushido » peuvent malgré tout être une tradition orale transmise par tous les clans de samouraïs de génération en génération comme le suggère Inazo NITOBE dans son livre ?

Il faut savoir, que jusqu’à l’ère Edo (1603-1867), un grand nombre de samouraïs étaient analphabète (ne savaient ni lire, ni écrire), que seuls les apprentissages pouvant leur servir directement au combat ou dans leur rôle de guerriers leurs étaient enseignés (dont le Bugei juhappan ou les 18 disciplines du bujutsu). Tout autre apprentissage était quasi-automatiquement bannis de l’éducation de base dont il bénéficiaient (il est avéré par exemple qu’il n’y avait pas de notion de calcul mathématique).

Ce qui pourrait expliquer qu’un code d’honneur est été transmis par bouches à oreilles de samouraï à samouraï, sans qu’aucun écrit ne soit existant pour les périodes antérieures à cette époque.

Il faut savoir, également, qu’un samouraï était former pour partir au combat à l’age de 15 ans.

Suite à tout les faits vu précédemment, on peux voir qu’un très fort doute est permis sur l’existence ou l’application d’un code d’honneur du samouraï avant le 20ème siècle. En effet, il est fort probable que la courte éducation dont bénéficiaient les samouraïs ne laissa pas la place à l’apprentissage de règles aussi compliqués qu’un code d’honneur comme le bushido (surtout lors des guerres et conflits, pendant lesquels les samouraïs devaient, probablement, passer peu de temps chez eux). Et lorsque l’on regarde le comportement générale des samouraïs avant l’ère Edo (1603-1867), il est apparent que celui-ci est très loin des enseignements contenus dans ce fameux code.

Personnellement, je pense que les samouraïs des ères Muromachi (1336-1573), Azuchi Momoyama (1573-1603) et celles encore plus antérieures, ont vécus à des périodes particulièrement rudes et violentes faites en grande partie de guerres et conflits armées. Certains de ses samouraïs sont devenus des légendes suite aux histoires transmises à l’oral de génération en génération et ensuite mises par écrits lors de l’ère Edo (1603-1867).

Mais nous savons tous, que les transmissions orales se déforment, qu’elles sont souvent embellis ou modifier (volontairement ou non) au fur et à mesure qu’elles passent d’une oreille à une autre, c’est comme ça que naissent les mythes et les légendes. Ce sont probablement ces mêmes mythes et légendes qui sont arrivés aux oreilles de Inazo NITOBE lorsqu’il était enfant !

En tout cas, il est sûr, que notre vision du samouraï, a été aujourd’hui idéalisée par une longue période de propagande en faveur d’un esprit national appelé « esprit samouraï » et d’ouvrages qui n’ont été diffusés qu’à partir du début du 20ème siècle et sont devenus des références dans les bibliothèques des pratiquants d’arts martiaux et de passionnés de la culture nippone.

Cédric VARESANO
Shidoshi du Bujinkan Budô Taijutsu

Auteur : Cédric alias "Grizzly"

Shidoshi (5° Dan) du Bujinkan

Une réflexion sur “L’honneur des samouraïs (le bushido)

  1. Bien vu Cédric.
    Les Occidentaux confondent, le Budo soshin shu (18ème siècle) et le Buke sho hatto (18 ème siècle), avec le Bushido moderne de Nitobe écrit en anglais, aux USA par le Quaker Nitobe, en 1900 et traduit en japonais en 1906.

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